OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 La chaîne alimentaire des médias http://owni.fr/2011/07/17/la-chaine-alimentaire-des-medias/ http://owni.fr/2011/07/17/la-chaine-alimentaire-des-medias/#comments Sun, 17 Jul 2011 15:53:40 +0000 Mary C Joyce http://owni.fr/?p=73884


Article initialement publié sur The Meta-Activism Project, repéré par OWNI.eu et traduit par Marie Telling. Sauf mention contraire, tous les liens de cet article sont en anglais.


Peu de dichotomies ont survécu au printemps arabe dans le monde des médias. Celle entre producteurs et consommateurs est déjà morte. Les blogs ont commencé la bataille il y a quelques années quand ceux qui étaient alors des lecteurs ont commencé à produire leur propre contenu. Aujourd’hui, ils créent du contenu partagé au sein de la communauté et relayé par les médias traditionnels. A quoi ressembleraient 24 heures d’infos sans des vidéos YouTube et des sources Twitter ?

La dichotomie entre anciens et nouveaux médias devient de plus en plus trouble. Oui, les médias sociaux sont nouveaux, fonctionnent en réseaux et en peer-to-peer, mais les médias traditionnels utilisent aussi ces protocoles et outils de partage. Des chaînes de télé internationales comme Al Jazeera fonctionnent en réseaux. Elles ne considèrent pas les médias sociaux comme des phénomènes marginaux mais comme des sources à part entière. Elles reconnaissent les citoyens comme des collaborateurs dans la fabrication de l’information, plus seulement comme des cameramen amateurs tributaires des professionnels pour valoriser leur travail.

Comment comprendre l’environnement médiatique du 21e siècle si celui-ci ne s’envisage pas en termes de dichotomie ? Une métaphore biologique est utile : celle du réseau trophique. « Trophique », vient du grec trophē – la nourriture – et fait référence aux mouvements et aux échanges de nutriments dans la nature. Une plante produit de l’énergie grâce à sa photosynthèse. Un rongeur mange la plante et absorbe son énergie. Le rongeur est ensuite mangé par un faucon ou un ours… ou meurt d’une attaque cardiaque.

Une dualité consommateur/producteur complémentaire et contemporaine

Pourquoi comparer l’environnement médiatique actuel à un réseau de chaînes alimentaires ? D’abord, l’information se comporte dans les médias comme la nourriture dans les chaînes : toutes deux sont des unités discrètes qui passent d’organismes en organismes, évoluant à chaque étape du processus, mais gardant des aspects essentiels de leur identité comme des images, des interprétations, des dates ou des histoires.

Ensuite, tout comme aucun organisme n’est uniquement un producteur ou un consommateur de nourriture, aucun média n’est uniquement un producteur ou un consommateur d’informations. L’herbe produit de l’énergie pour le lapin et consomme l’énergie du soleil. Un journaliste citoyen filme depuis son portable la vidéo d’une manifestation qui sera diffusée par une chaîne de télé quelques heures plus tard. Contrairement aux dichotomies mentionnées précédemment, qui sont mutuellement exclusives, la dualité entre consommateur et producteur est devenue complémentaire et contemporaine : chaque consommateur d’informations est potentiellement aussi un créateur d’informations, de celui assis sur son sofa au rédacteur en chef de journal.

Comme les chaînes alimentaires, les réseaux d’informations sont chaotiques et imprévisibles. Un cochon pourra être mangé par un ours (mais aussi par Mark Zuckerberg) ou bien mourir de vieillesse. De même, un tweet ou un post de blog pourra être repris par CNN, par quelques blogs locaux, ou ne jamais quitter son audience initiale. Les réseaux d’informations sont même plus chaotiques que les chaînes alimentaires. Une calorie ne peut être consommée que par un seul organisme au même moment, alors que chaque élément de contenu digital peut être copié infiniment et simultanément. Dans un environnement composé d’« organismes » médiatiques complexes et variés, le chemin qu’adoptera une information est difficile à prévoir… ou à contrôler.

Interconnexion et double nature de ses acteurs

Malgré le chaos, des catégorisations des chaînes alimentaires sont possibles et cela vaut aussi pour l’univers des médias. On retrouve deux types de consommation/production de l’information :

  • La nutrition autotrophique convertit la lumière du soleil en unités d’énergie utilisables par d’autres organismes. Dans la nature, les plantes sont autotrophes. Dans l’environnement médiatique, il s’agit de convertir des phénomènes physiques (événements, témoignages …) en informations utilisables. Il y a quelques années, seuls les journalistes professionnels pouvaient effectuer cette conversion. Il est maintenant de plus en plus simple d’enregistrer et de transmettre des informations. Tout le monde peut avoir un rôle d’autotrophe.
  • La nutrition hétérotrophique utilise l’énergie qui a déjà été transformée en forme utilisable par un autre organisme. Dans la nature, les animaux sont hétérotrophes. Dans l’univers médiatique l’hétérotrophie est la consommation d’informations créées par d’autres organismes. Comme quand vous lisez un post de blog ou écoutez une émission de radio. Ou comme lorsqu’un producteur de télé choisit une vidéo de citoyen pour son émission. La chaine hétérotrophique peut être très longue. Tout comme une calorie peut être transmise du soleil à une carotte à un lapin et vers un être humain, une information part d’un témoin, se transforme en post de blog, puis en tweet pour finir en article de presse. Chaque information peut prendre une multitude de chemins différents. On peut tracer ces unités sur des plateformes discrètes (voir les sets de données de tweets avec le hashtag #Jan25 sur Engine Room par exemple) mais nos méthodes d’analyses échouent dès lors qu’une information passe d’une plateforme à une autre ou d’un média à un autre.

Bien sûr, la symbiose n’est pas parfaite. Oui, les professionnels des médias auront tendance à agir en autotrophes et à convertir leurs propres informations. Oui, la plupart des citoyens seront plus enclins à consommer des informations existantes plutôt que d’en créer. Mais chacun peut choisir d’être autotrophe ou hétérotrophe à tout moment. C’est ce qui rend les choses intéressantes.

L’analogie entre chaînes alimentaires et médias résisterait-elle à une analyse plus détaillée des mécanismes spécifiques ? Bien sûr que non. Mais la métaphore est toujours intéressante pour décrire l’environnement médiatique de plus en plus inter-connecté et la double nature de ses acteurs.


Crédits Photo FlickR CC by-nc-sa NHBD

]]>
http://owni.fr/2011/07/17/la-chaine-alimentaire-des-medias/feed/ 3
L’avenir de la publicité est (totalement) numérique http://owni.fr/2011/03/21/l%e2%80%99avenir-de-la-publicite-est-totalement-digital/ http://owni.fr/2011/03/21/l%e2%80%99avenir-de-la-publicite-est-totalement-digital/#comments Mon, 21 Mar 2011 13:35:10 +0000 Sébastien Robin http://owni.fr/?p=52255 Vendredi 21 Janvier, dans un échange de mails avec Naro, celui-ci me demande si je ne veux pas faire un petit article ou un commentaire au sujet de la conférence à laquelle j’assistais ce matin là, IAB/TASC : les nouveaux leviers de l’achat display.

Sur le moment je fus surpris, d’une part Genaro est un très bon rédacteur, et il m’est difficile de faire aussi bien et aussi passionnant que ses articles et d’autre part je n’imaginais pas qu’il me demanderait de faire un article sur son blog. D’un autre côté, je n’ai pas hésité longtemps, voire pas du tout pour être honnête pour la simple raison que le sujet que je vais aborder me passionne, que Genaro connaît déjà ce sujet et s’il me demande d’en parler c’est qu’il partage mon opinion. D’autre part je lui dis souvent que rédiger des articles sur le marketing de facebook et twitter est plutôt facile, Genaro me lance donc un défi que je m’amuse (sérieusement) à relever.

Avant de me lancer je précise néanmoins je ne suis pas Maurice Levy, je n’ai pas de Rolex et je ne suis pas une personne habituée de la dernière de couv’ des pages saumon du Figaro. Je suis cependant un professionnel de la communication [digitale] depuis 12 ans, j’ai donc embrassé ce métier directement après mes études, je sais donc de quoi je parle (moi aussi).

J’affirme donc la chose suivante :

L’avenir de la publicité est numérique

et je vais m’appliquer à vous expliquer pourquoi.

La croissance des investissements en publicité numérique impose d’adapter l’organisation des agences

Mettons de côté les explications sur les faits suivants et considérons les comme des postulats :

  • Internet est devenu un média à part entière
  • les investissements en publicité sur internet sont en croissance soutenue depuis des années
  • les investissements en publicité sur internet ont dépassé les investissements en TV en Angleterre, et en France ils vont dépasser les investissements en radio sous peu

En conséquence de quoi on en déduit que le « numérique » est pris au sérieux. Les agences sortent d’ailleurs de beaux discours rassurants disant qu’elles “numérisent” leurs équipes, Genaro en parlait ici la semaine dernière.

Ce que je vais vous exposer ici, les patrons des agences médias, de pub etc.. l’ont compris :

  • ils doivent adapter leur savoir faire à l’évolution de la consommation des médias
  • de manière à garder ce savoir-faire qui leur fait gagner des clients et de la marge-brute.
  • Il est question de « numériser » l’expertise des personnes qui travaillent en agence sur les autres supports : papiers, affichage, radio , TV car ils se sentent perdus dans le monde numérique, ils ne savent plus répondre aux demandes de leurs clients qui en ont compris l’intérêt.

Je vous invite pour confirmer cela à lire l’article de Danielle Sacks intitulé « The Future of Advertising ».

L’avenir de la publicité est (totalement) Numérique

Explorons ensemble les fondements de la publicité numérique aujourd’hui.

Google, l’ogre de la publicité “search” / La communication dans l’instant

Google est une société qui dégage 99% de ses revenus de la publicité sur internet,  la principale mission de Google est d’apporter un service aux internautes qui soit un parfait réceptacle au… marketing des annonceurs.

Sur le marché de la publicité numérique, Google est un ogre, raflant en France environ 42% de tous les investissements effectués en publicité sur internet : environ 960 millions d’€ sur la France sur un total de 2.3 mds d’€ pour des publicités en liens sponsorisés. Les 58 % restant sont répartis entre les autres manières de communiquer online :

  • Display
  • Affiliation
  • Emailing
  • Mobile.

La « killer equation » de google repose sur un principe :

  • VOUS lui donnez vos termes de recherche
  • vous exprimez vos besoins du moment présent
  • et le moteur se charge de répondre immédiatement à vos besoins

8% des internautes cliquent sur les publicités display

La publicité graphique / display ne répond à aucun de vos besoins, elle est délivrée aléatoirement et sans rapport direct avec vos préoccupations, ces publicités sont vécues par les internautes comme une agression, un parasitage, une obligation dont ils se passeraient bien.

Des études Heatmap montrent d’ailleurs qu’au fur et à mesure les zones des bannières publicitaires sont évitées par les yeux, ce qui rend ces formats beaucoup moins performants pour les annonceurs. Surtout ceux qui communiquent en période de crise : aujourd’hui seuls 8% des internautes cliquent sur les bannières et génèrent 85% de tous les clics enregistrés (Etude comscore Natural Born Clickers).

La très courte période entre le moment où vous exprimez vos besoins et la réponse proposée est donc un des facteurs clés du succès de Google, et différence cruciale des liens sponsorisés par rapport aux autres formes de publicité sur internet qui garantit leur succès. Il est donc normal que les annonceurs aient ces dernières années augmenté leurs investissements sur les liens sponsorisés. (+9% encore en 2010).

Pourquoi ne pas communiquer 100 % en liens sponsorisés ?

Sur les liens sponsorisés, la communication pour une marque se résume à un bout de texte. Il lui est également nécessaire de travailler sur l’« image », une image de marque qu’il faut créer, entretenir ou renouveler. Sur le web cela s’effectue plus facilement avec du son et des images, les autres formes de publicités apportent sur internet une réponse à ce besoin des annonceurs, et ne disparaîtront donc pas.

Des études (Avenue A/Razorfish & yahoo) prouvent par ailleurs aux annonceurs qu’un mix de communication d’image et de liens sponsorisés est plus efficace que des liens sponsorisés seuls.

La publicité display connait sa révolution depuis 2 ans

Face à ces constats les professionnels de la publicité display ont imaginé de nouvelles solutions technologiques : les « adexchanges »

  • qui rendent l’achat/vente, la diffusion et le ciblage bien plus efficaces
  • augmentant par rebond les performances des campagnes display
  • et par conséquent l’intérêt des annonceurs (+12% croissance display 2010). Ce sont ces nouveaux leviers de l’achat display qui étaient évoqués jeudi dernier lors du colloque IAB.

Ces solutions technologiques apportent un vent de fraîcheur pour l’ensemble de la profession publicitaire numérique, dont les annonceurs, les agences mais aussi les éditeurs de sites qui tirent l’essentiel de leurs revenus de ces publicités display. Il y avait donc la foule des grands jours pour ce petit déjeuner professionnel (environ 120 personnes) où les principaux acteurs actuels du marché (Havas Digital, Orange AdMarket, Google Adexchange, Matiro, Rubicon Project, Mediamind) ont expliqué ce qu’étaient les Adexchanges et esquissé les changements à venir.

Les Adexchanges – La bourse de la publicité display

La principale information à retenir si l’on n’est pas versé dans ce milieu est la suivante : les adexchanges sont des plateformes automatisées d’achat / vente d’espace publicitaires. Pensez à la bourse (actions et obligations hein), remplacez les actions par des espaces publicitaires digitaux remplacez les banquiers par des éditeurs et des agences et vous obtenez les Adexchanges.

Les solutions qui se sont greffées autour - DSP/SSP/DMP… sont des satellites des solutions Adexchanges et proposent soit aux vendeurs, soit aux acheteurs, des outils permettant d’optimiser les performances ou les revenus des campagnes passant sur les adexchanges.

Il existe une 15aine de solutions Adexchanges présentes aux USA, seulement 3 en France actuellement mais pas des moindres  :

La publicité TV est appelée à utiliser les AdExchanges, en concurrence avec le web

Les adexchanges et solutions annexes modifient profondément la publicité online, que cela soit dans la manière d’acheter ou de vendre ses espaces publicitaires mais aussi dans la façon de préparer une campagne, dans la façon de se projeter les résultats futurs (côté annonceur) ou les revenus futurs (éditeurs.).

Cependant ces solutions n’ont pas que pour vocation d’être utilisées dans l’univers de la publicité numérique. En effet, si demain ce sont les TV et les radios qui seront numériques, les espaces publicitaires le seront donc également. C’est pour ces supports une véritable révolution que cela soit dans le métier mais aussi et surtout en terme de concurrence.

En effet les français ont beau avoir inventé le triple play et les box,depuis l’avènement de l’IP TV lors du CES 2010 les acteurs aux projets les plus ambitieux sont américains et s’appellent Google, Apple, Hulu etc.. Ces sociétés préparent ou ont lancé des projets de TV numériques (Google TV, Apple TV) qui seront demain disponibles au travers des box, au travers de l’accès internet et vous pourrez les regarder comme vous zappez aujourd’hui sur la TNT.

Le risque pour les TV est de perdre la main sur la mise à disposition de leur contenu et donc de voir leurs revenus publicitaires disparaître car ils ne maitriseront plus aucun levier de la chaîne : contenu, accès, outils et méthodes de ventes des espaces publicitaires.

On observe d’ores et déjà aux Usa l’éclosion de sociétés qui proposent d’acheter des espaces publicitaires sur des supports aussi variés qu’internet / le mobile / les billboards vidéos 4×3 ou plus, les chaînes de TV in store etc.. depuis son ordinateur personnel. Demain viendront s’ajouter à cela les supports TV et radios numériques.

Les médias sont tous numériques, les formats de publicité vont s’unifier

On pourrait penser que la presse sera épargnée ? Je n’en suis pas si sûr dans la mesure où les tablettes ipad & co comme mode de consommation des contenus sont en train de bouleverser la publicité des éditeurs qui sera demain entre les mains d’acteurs comme l’Appstore d’Apple qui ponctionne au passage 30% des revenus.

Je vous annonce donc que la publicité de demain sera totalement numérique et que cela aura un impact sur l’ensemble des métiers qui composent actuellement cet univers : les acheteurs / vendeurs, les créatifs. La révolution de la publicité sur le web et le mobile impactera demain les autres supports médias car tous ces supports se numérisent.

Article initialement publié par [Naro]Minded, propulsé par Genaro BARDY

Blog de l’auteurCompte Twitter de l’auteur

Crédit Photo Flickr CC : Marylise Doctrinal, Gilderic, Stéfan, Liloueve

]]>
http://owni.fr/2011/03/21/l%e2%80%99avenir-de-la-publicite-est-totalement-digital/feed/ 9
Mind the logo, Gap! http://owni.fr/2010/10/14/mind-the-logo-gap/ http://owni.fr/2010/10/14/mind-the-logo-gap/#comments Thu, 14 Oct 2010 17:47:12 +0000 Alexis MONS http://owni.fr/?p=31662 Le nouveau logo Gap a donc tenu … 7 jours. A peine sorti, et sous le flot des critiques, Gap a reculé et en est revenu à son bon vieux logo historique. Sur cette base, j’observe des réactions contrastées, mais qui me semble largement marqué par une forme de malaise. Ne sommes nous pas face à une forme de dictature du (net)prolétariat ? hostile au changement et s’imposant aux marques. Derrière ce qui pourrait ressembler à la manifestation du pouvoir des consommateurs, les marques doivent-elles craindre de changer ou innover ? Il ne faut pas s’enflammer et observer des raisons objectives à ce qui est un accident industriel, mais aussi observer quelques signaux faibles …

Changer, pour quoi faire ?

Quand j’ai vu le nouveau logo, je n’y ai surtout rien vu. Et j’ai eu beau chercher, je n’ai pas trouvé chez Gap le début de l’ombre d’une signification à ce changement.
Changer est un signal au bout duquel il y a un message. S’il n’y a pas de message, le changement n’a aucun sens autre – potentiellement – que celui de la lubie d’un exécutif en mal d’appropriation. De fait, cela n’a surtout aucune signification pour le client, alors que cela affecte directement son expérience. Le logo n’est pas qu’un simple code de reconnaissance, mais un code d’appartenance s’il en est. Changer le logo Gap sans l’inscrire dans une page qui se tourne, c’est déconnecter la marque de la mythologie de celle-ci, qui appartient d’abord et avant tout au client, et que le marketing se doit de faire vibrer.
Ce qui me frappe le plus dans l’histoire de Gap, c’est surtout la reddition en rase campagne, qui n’a d’autre signification que l’absence d’argumentation et de projet, ou l’abandon de ceux-ci, s’ils ont existé, ce qui serait pire.

Faut-il écouter les gens, ou leur demander ce qu’ils en pensent ?

J’ai été relire un billet que j’avais commis il y a un bon moment maintenant : Écouter ses clients, pour quoi faire ?. J’y expliquait que l’on n’écoutait pas ses clients pour faire ce qu’ils demandent, mais pour les comprendre. En effet, si vos clients vous demandent de faire quelque chose, le jour où vous serez très fier de leur dire que c’est fait, vous ne recevrez que des haussements d’épaules disant au mieux que ce n’est pas trop tôt, surtout que vous auriez du le comprendre tout seul et il y a trop longtemps. Dell a montré il y a longtemps que c’était aussi une bonne première étape de démarche de reconstruction, quand on est devenu un punching-ball. Comprendre est surtout la meilleure manière d’appréhender ce qui fait adhésion et appartenance, donc de construire et développer l’énergie qu’il y a dedans. C’est à ça que sert le web social d’abord. C’est le sens de ce qu’il ne faut plus appeler de la e-reputation.

Dans le cas de Gap, on est simplement dans le contexte que changer doit avoir un sens. S’il n’y en a pas, il n’y a rien à expliquer aux gens qui sont par nature hostile au changement. Cela laisse la place à tous les arguments contre. Beaucoup ont dit que Gap avait reculé en écoutant le message, celui des mécontents. C’est parfaitement vrai. Il n’y avait personne pour développer une quelconque forme de justification.

C’est d’autant plus problématique que Gap n’est pas une marque avec une culture du changement. Changer n’est pas le problème d’un Apple, notamment, du genre de ces marques qui impriment un vrai rythme de renouvellement, sans parler de la mise en scène. Le comble est sans doute que, dans l’univers de la mode, il y a matière à créer du renouvellement et une dynamique, non ? Quand on n’a pas cela, le changement sera un événement lourd de sens caché, d’attente d’un message, qu’il sera bon d’avoir soutenu avec un travail préalable d’évangélisation, un signal de progrès propre à susciter une adhésion, à fabriquer des soutiens qui répondent aux critiques.

Les gens sont-ils casaniers sinon réactionnaires ?

Oui, les gens sont comme ça. Les gens aiment les habitudes. Les gens ne sont pas à l’aise dans la nouveauté car ils ne la maîtrisent pas. Ils aiment beaucoup, par contre, revisiter des classiques. C’est d’ailleurs le propre des interfaces innovante de ré-interpréter des modes d’interactions culturels, ou d’être intuitif et simple.

Il est assez croustillant qu’au même moment ou Gap bat en retraite, le CEO de Digg recule lui aussi. Une habitude de cette vieille maison du web 2, depuis 2008 et les premières révoltes de ses usagers face au changement. Digg nous a appris que les gens investissent, au sens propre du terme, les environnements sociaux, les lieux d’appartenances, et qu’ils détestent par dessous tout que les règles du jeu changent et soient susceptible de remettre en cause leur investissement. C’est un peu comme si les utilisateurs de Digg disaient aux actionnaires et à l’exécutifs : gardez l’argent et surtout, ne changez rien ! Il y a peut-être un peu de ça aussi chez Gap.

Pensez aussi aux reculades de Facebook, qui a depuis changé de tactique en instillant le changement simultanément au fait de rajouter des choses dans la caisse à jouet.

Il faut peut-être se poser la question de savoir si les marques, en tous les cas celles qui ont su créer du sentiment d’appartenance, ne ressemblent pas aussi à une force de société, en tous les cas des biens communs qui servent nos intérêts dans les réseaux sociaux que nous entretenons. Il est patent que la consommation fabrique des matériaux à l’édification de ces constructions. Une bonne raison pour ne pas aimer le changement de ces briques, surtout si on n’en comprend pas le sens.

La frontière de l’entreprise est tombée, les clients en font partie

Le code de marque appartient aux clients, c’est en tous les cas un bien commun partagé avec la marque. Il est constitutif de l’appartenance, cette chose précieuse qui caractérise l’attachement entre une marques et ses clients. Il ne peut pas être soumis aux diktats d’un seul. La conclusion est sans doute que l’entreprise étendue est plus qu’une vue de l’esprit, qu’elle ne procède pas d’une décision de la faire, qu’elle l’est déjà tacitement. A ignorer que le monde a changé, à penser que de ne pas changer n’a aucun impact, les marques, entreprises et institutions font une grave erreur.

Cet article a été initialement publié sur le blog de groupeReflect / Parole d’expert

]]>
http://owni.fr/2010/10/14/mind-the-logo-gap/feed/ 4
Marketeux: libérez vos données! http://owni.fr/2010/08/31/marketeux-liberez-vos-donnees/ http://owni.fr/2010/08/31/marketeux-liberez-vos-donnees/#comments Tue, 31 Aug 2010 10:51:11 +0000 Alexis MONS http://owni.fr/?p=26555 C’est la fin de l’été et nous allons parler tourisme. Pourquoi? Parce que c’est un de mes domaines préférés, bien en pointe dans la mutation impulsée par les usages numériques et généralement révélateurs de ruptures. A ce titre, je vais vous expliquer qu’il va être le siège d’une nouvelle bataille dans l’accès à une ressource inattendue pour lui : les développeurs. Une compétention emblématique d’une approche marketing qui concernera bientôt pratiquement tout le monde. Bienvenue à l’ère des organisations plateformes.

Chez Google, on fête les développeurs avec des ballons

De l’art de fabriquer des silots à grain

Je lisais récemment de beaux papiers sur la performance des fonctionnalités de recherches sur les sites de tourisme. L’occasion de repenser aux SIT (Systèmes d’Informations Touristiques), dont le développement et l’énergie qu’ils engloutissent fait penser à Sisyphe.

Il y a l’hétérogénéité des systèmes et les modèles pas vraiment ouverts qui les peuplent. Passons. Il y a surtout, derrière l’idée de consommateurs experts, pour lesquels la décision sera d’autant plus acquise que les produits soient filtrables et triables à discrétion grace à un niveau de description super exigeant, sans parler des données chaudes que sont notamment celles des disponibilités.

C’est une erreur de s’enfermer dans cette approche à mon sens. Elle a en effet tous les attributs pour s’imposer une dictature des prix. D’une part en raisonnant en terme de produits banalisés interchangeables, d’autre part en externalisant l’expertise chez le client, donc en la perdant. Après, on vient me parler d’affinitaire, de marketing de l’expérience. Cherchez l’erreur. Cela dit, il y a aussi du low-cost ou du “meilleur prix”, sans parler des sites de comparaison. Comme en e-commerce en général, la pression est très forte pour exister aux yeux d’un public prétendument avide d’opportunités.

En tout état de cause, nous voilà avec des systèmes gavés de données, dont la maintenance est lourde et coûteuse, d’autant plus quand elle s’appuie sur une collecte associée à des organisations non liées par des liens de subordination.

Des apps à la pelle, mais pour quoi faire ?

Si l’on pouvait douter d’autant de moyens dépensés à nourrir les SIT, ce n’est plus le cas si l’on considère l’engouement associé aux applications mobiles. Il est tel, et suffisamment appuyé par des études définitives, que je vais vous épargner d’en faire des tonnes.

Ce qui est par contre certain, c’est que l’on assiste à la production de profusions d’applications clones, selon la conviction que le consommateur est inévitablement demandeur du guide touristique de la destination et que c’est de la responsabilité du management de la destination de le faire. En conséquence de quoi, les destinations dépensent de l’argent à développer des applications et à les promouvoir. Extension du domaine des plateformes me direz-vous. En effet, avec l’avantage que soit le contenu est parfaitement froid, soit il sort du SIT et qu’on peut même se dire qu’on fait une bonne affaire à valoriser cette montagne de données qui coûte si cher.

Il y a pourtant bien mieux à faire.

Libérer les données pour libérer les usages

Les grandes idées viennent toujours du terrain et c’est une vérité fondamentalee de l’économie moderne. On avait donc regardé avec amusement ou circonspection les promoteurs de l’open data, libération des données en bon français, ferrailler contre la puissance publique. L’exemple anglais est bien connu.

Depuis, l’opendata a fait son chemin et démontré ses possibilité. Les fondus d’e-government connaissent bien les initiatives de l’administration Obama ou encore FreeOurDatas. En France, l’exemple vient de Rennes.

De quoi s’agit-il ? Plutôt que d’inventer des services, de financer des applications et de s’évertuer à les faire adopter par le public qui n’a rien demandé, il s’agit d’investir dans la viabilité et la qualité du gisement de données, de l’ouvrir par des APIs et web services ouverts et de superviser l’appropriation par la société et l’économie. Ainsi, à Rennes, des tas d’applications mobiles sont nées en quelques mois, exploitant le gisement de données ouvertes concernant les transports publics. Aucune de ces applications n’a coûté à la collectivités.

Nous sommes ici typiquement dans une logique ouverte qui consiste à créer un écosystème économique, permettant de démultiplier le champ des initiatives au maximum, de ne surtout pas se priver d’une bonne idée et d’impulser une offre de service riche et diversifiée. Une offre que le détenteur des données ne pourrait même pas s’imaginer mettre en oeuvre en rêve.

Evidemment, la contrepartie, on perd du contrôle, d’une part, et on gagne d’autre part l’obligation de garantir le service d’accès aux données. Une obligation que l’on avait déjà tacitement de toute façon. En retour, les service et les usages se développent beaucoup plus vite, à coût très faible, suscitant de fait l’espérance d’avoir là un vai moteur de développement économique, confère ma sortie dans RSLN Mag en ce début d’année, quand je disais que la puissance publique cherche de la croissance alors qu’elle est assise dessus : libérons les données publiques !

Comme vous l’avez compris, ce que je dis, c’est que les destinations feraient mieux d’investir dans l’opendata que de s’ingénier à dépenser l’argent qu’elles n’ont pas dans des applications qui se ressemblent toutes et que personne n’a demandé.

Je le pense tellement fort que je sais que l’accès aux données, mais aussi aux contenus, est un sujet récurrent et déplaisant au sein du management interne de la destination. Les professionnels, à qui on demande de fournir de la données, toujours plus de données d’ailleurs, voient souvent cela plus comme une obligation bureaucratique que comme une contribution à la qualité du bien commun qu’est la destination, sans parler de valeur de marché. S’ils pouvaient bêtement réexploiter eux-même ce gisement, grâce à un framework simple sinon de bêtes widgets, sans doute verraient-ils d’un autre œil l’exercice et l’effort qu’on leur impose.

Les applications, nouvelle fracture numérique entre les destinations

Je le pense tellement fort que je ne peux que constater qu’il n’y a pas que les destinations qui produisent des applications. C’est un vrai marché, surtout sur les endroits qui sont porteurs, bien entendu. Il suffit d’aller taper n’importe quel nom de ville ou de territoire dans l’app-store et de compter les applis. Essayez, c’est éclairant !

Outre l’hétérogénéité des données, donc de l’information et de l’image de la destination que l’on observe entre ces applications, la mise à disposition de données ouvertes permettrait au management de la destination de s’assurer d’un minimum de cohérence dans l’information et le contenu.

Mais surtout, on ne peut que constater déjà, qu’il y a fracture entre destinations riches, naturellement génératrices d’applications, et les autres qui doivent se les payer ! Au moins les secondes peuvent-elles espérer, avec de l’opendata, abaisser l’équation économique qui pèse sur la non-réalisation d’application. L’exemple de Rennes a bien montré que cette approche faisait émerger des services de niches, impensables autrement, outre la vitesse, sans comparaison aucune, avec laquelle le bouquet de services se développe.

Sortir de l’impasse, changer de modèle, prendre le risque de l’innovation

Tout ceci est très séduisant pour nous qui baignons dans l’IT, qui sommes à l’aise avec les licences libres, creative commons, sans parler du Saas ni du Cloud. C’est même excitant d’envisager les modèles de développement crowdsourcés ou similaires à l’open-source qu’ils représentent. C’est ce que l’on appelle (donc) les organisations plateformes, car elles se positionnent comme des écosystèmes de développement de services.

Nous, agences, sommes parfaitement à l’aise avec cela car il est dans notre nature de gérer l’hétérogénéité de compétences que cela requiert, plus la culture du réseau. Il en va autrement pour le politique ou le manager de destination. S’imaginer que l’avenir d’un CRT réside dans l’animation de communautés de développeurs ne va de soit.

C’est pourtant ma conviction qu’à l’instar du datajournalism qui disrupte les médias actuellement, le marketing va vivre une nouvelle révolution à l’aune de l’opendata et des organisations plateformes. Le tourisme me paraît plus concerné que d’autres.

L’avenir appartient aux audacieux. Qui veux jouer avec moi ?

Article initialement publié sur le blog d’Alexis Mons, hébergé par la soucoupe, sous le titre “Le marketing des destinations à l’heure des données ouvertes”

Illustrations CC FLickR par Ludovic Toinel, tobybarnes

]]>
http://owni.fr/2010/08/31/marketeux-liberez-vos-donnees/feed/ 5